CULTURE

ParJacques BONNAUD

CULTURE

Cinéma

A l’évocation du cinéma mongol, le premier titre qui vient à l’esprit est celui du film de Mikhalkov, Urga, Lion d’or au Festival de Venise 1991. En revanche, ce que les spectateurs auront peut-être oublié, c’est que ce très beau film a été réalisé par un Russe et a été tourné en Chine, dans la province de Mongolie-intérieure !

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Le cinéma est arrivé très tôt en Mongolie, puisque la première projection a eu lieu en 1903, et que le Bogd Khan assistait souvent à des projections privées dès 1913. Le septième art mongol s’est développé sous la tutelle soviétique, qui a équipé le premier studio du pays, Mongol Kino, ouvert dès 1935. Tout naturellement dans le contexte politique qui était celui de la Mongolie des années 1930, les premiers films produits à Oulan-Bator étaient des oeuvres de propagande, tournées en collaboration avec des réalisateurs et des techniciens russes. Le premier long-métrage réalisé par un Mongol date de 1938. Il s’agit d’un film de Temet Natsagdorj, Chemin de Norjmaa, qui vante les mérites de la médecine moderne et dénonce l’archaïsme de la religion.

La période durant laquelle Choybalsan était au pouvoir (1939-1952) fut celle des grandes fresques historiques à la gloire des héros du peuple. Le film le plus représentatif de cette période, et le plus grand succès populaire, est Sükhbaatar, réalisé en 1942 et qui fait l’éloge du père de la révolution mongole.
A partir des années 1950, dans un contexte de relatif apaisement politique, les premières comédies font leur apparition. Le réalisateur le plus connu de cette période est Dorjpalam, à qui l’on doit notamment Nous avons toujours des difficultés (1956), qui raconte l’épopée à travers le pays de paysans partis à la recherche d’une pièce de rechange pour leurs machines agricoles.

Les années 1960 et 1970 permettent aux réalisateurs mongols de s’intéresser davantage aux problématiques sociales et de faire leurs premiers pas de documentaristes. Ce n’est qu’à la fin des années 1980, lorsque le contrôle politique sur la production cinématographique se relâchera, que les réalisateurs pourront aborder la question de la tradition mongole et de son héritage dans la société contemporaine.

Alors que la production cinématographique était très abondante durant les années soviétiques (350 longs métrages entre 1938 et 1989), le cinéma mongol a connu un brusque arrêt au début des années 1990, faute de moyens financiers. Petit à petit, des maisons de production ont ouvert leurs portes, des films indépendants à budget limité ont vu le jour, et la dynamique s’est remise en route. A tel point que la Mongolie compte aujourd’hui cinq écoles de cinéma et près de 200 studios !
Pourtant, très peu de films mongols ont réussi à franchir les frontières de leur pays, à l’exception très remarquable du film de la réalisatrice Byambasuren Davaa, L’Histoire du chameau qui pleure, qui est même sorti en salles en France en octobre 2004. Avec ce film mêlant documentaire et fiction autour de scènes de la vie nomade, cette jeune réalisatrice née en 1971, ancienne étudiante à l’institut de cinéma de Munich, a remporté plusieurs prix en Europe et aux Etats-Unis, et rappelé au monde des cinéphiles que le cinéma mongol méritait une place sur les écrans internationaux. En 2009, Davaa sortait son quatrième film, Two Horses of Genghis Khan. Le scénario compte l’histoire d’une jeune femme, Urna, qui a promis à sa grand-mère mourante de lui rapporter un violon au bout duquel une tête de cheval a été sculptée. Les paroles d’une chanson qui explore l’histoire de la Mongolie y ont été gravées. L’enquête pour récupérer le précieux objet conduit l’héroïne sur les sentiers d’un voyage passionnant au coeur de la Mongolie et de son passé. Les secrets de la chanson se délient à chaque rencontre.

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La Mongolie est également source d’inspiration pour les réalisateurs étrangers. Fin 2014, le réalisateur français Pascal Plisson, qui a obtenu le César du meilleur film documentaire (2014) pour Les Chemins de l’Ecole, est parti tourner en Mongolie une partie de son film documentaire sur l’éducation Le Grand Jour. Il retrace l’histoire de quatre garçons et filles, dont celle de Deegii, âgée de 11 ans, qui vit dans les quartiers pauvres de yourtes d’Oulan-Bator, et rêve de devenir contorsionniste. Elle s’entraîne pour passer une audition dans le but d’intégrer une grande école de cirque à Singapour. Pascal Plisson a filmé l’entraînement de cette petite fille et le grand jour de son audition… Le film Le Grand Jour fut présenté au Festival de Cannes en 2015. A noter également la série Netflix, Marco Polo (2 saisons), lancée en 2014, qui emmène le voyageur vénitien à la cour du grand Kubilai Khan, l’occasion de découvrir cette période de l’histoire et de mesurer l’incroyable rayonnement d’alors de la Mongolie sur le monde.

 

Danse

La danse bielgee. La danse bielgee est une tradition particulièrement vivace dans l’ouest du pays. Souvent accompagnée de mélodies jouées au moriin khuur ou au yootchin. C’est une danse dans laquelle les pieds restent immobiles et où seul le haut du corps est en mouvement. La danse s’apparente à une pantomime, puisqu’elle représente des scènes de la vie quotidienne. Les thèmes sont donc souvent imposés, mais la danseuse improvise ses mouvements. De légères variations de cette danse sont repérables selon les groupes ethniques : certains dansent accroupis, d’autres debout…

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Les danses religieuses. Les danses religieuses sont probablement les plus connues, grâce notamment aux danses tsam, récemment réhabilitées dans le pays. Il s’agit de rites religieux qui mettent en scène les enseignements bouddhistes dans un mélange de théâtre et de danse. Les danses tsam sont particulièrement impressionnantes, grâce à la richesse de leurs costumes. Certaines représentations nécessitaient jusqu’à 108 personnages et costumes différents.

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Contorsionnistes. La Mongolie est également le pays des contorsionnistes. Cette discipline traditionnelle donne toujours lieu à de fréquentes représentations, en Mongolie mais aussi beaucoup à l’étranger. Cette technique est reconnue par l’Unesco comme patrimoine culturel.

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Littérature

Le plus ancien et le plus important ouvrage de la littérature mongole est assurément L’Histoire secrète des Mongols. Rédigé au XIIIe siècle, probablement autour de 1240, il n’a été retrouvé que dans sa traduction chinoise. Ce long texte comporte de nombreux éléments de légendes, des contes et des mythes locaux, mais également des parties plus historiques, voire totalement bureaucratiques (comme, par exemple, les décrets gouvernementaux de Chinggis Khaan et de son fils Ogödeï). Rédigé à la cour d’Ogödeï, le texte sert également à entretenir le culte de Chinggis et, par conséquent, à légitimer le pouvoir de son fils. Ainsi, le fondateur de l’Empire mongol est-il doté d’une naissance miraculeuse, et ses conquêtes et exploits politiques et militaires sont retracés avec précision. L’Histoire secrète des Mongols reste néanmoins un formidable témoignage de la vie nomade et de ses traditions, ainsi que de l’organisation de la structure gouvernementale, de l’armée, des codes pénaux du XIIIe siècle.

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Textes religieux

Au cours des siècles suivants, c’est la littérature religieuse qui va régner sans partage en Mongolie. Essentiellement écrite en tibétain, elle était l’apanage des moines, qui en étaient les auteurs, mais également les seuls destinataires. La production littéraire était néanmoins très riche, puisque la Mongolie possède actuellement la plus grande collection de sûtra bouddhiques au monde. Entre un et trois millions de textes sont gardés dans la bibliothèque centrale d’Oulan-Bator, et près de 600 000 autres sont conservés dans le monastère Gandan.

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Malheureusement, les purges des années 1930 ont entraîné la perte de nombreux manuscrits, mais également l’éparpillement des textes rescapés. Depuis 1999, un programme international a entrepris de reconstituer ces livres anciens : un projet qui pourrait n’être achevé que dans 20 ans, au mieux !

Tradition de proverbes

La Mongolie compte également un grand nombre de proverbes que l’on peut intégrer au patrimoine littéraire national. Il s’agit de courts poèmes de trois vers, qui servent à décrire et comprendre l’univers et expriment certaines caractéristiques de la société mongole. Il en existerait un peu plus de 6 000. En voici un petit aperçu :
 » Les cieux sont infinis. La sagesse est infinie. La stupidité est infinie. « 
 » Sombre est une personne sans éducation. Sombre est une nuit sans lune. Sombre est un foyer sans troupeau. « 
 » Le savoir est le trésor suprême. Les enfants sont le trésor le plus précieux. Les biens matériels sont le trésor le plus vil. « 
 » Stupide est celui qui vante son cheval. Idiot est celui qui vante sa femme. Et le plus stupide est celui qui se vante lui-même. « 

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Littérature contemporaine

La littérature contemporaine mongole peine à dépasser les frontières nationales. Le seul auteur connu en Europe est Galsan Tschinag. Né en 1944 dans l’Altaï, il est parti étudier l’allemand à l’université de Leipzig, avant de revenir enseigner à l’université d’Oulan-Bator. Sous le joug communiste, Galsan Tschinag a préféré retrouver la minorité tuva de l’Altaï, dont il est originaire, et devenir conteur et chanteur selon la tradition de ses ancêtres. Vivant aujourd’hui entre l’Altaï, Oulan-Bator et l’Europe, Galsan Tschinag est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages, nouvelles, romans et poèmes, dont une partie a été traduite en français

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Il y a également  Ian Manook  de son vrai nom Patrick Manoukian né en France, qui met en scène son inspecteur de police Yeruldelgger Khaltar Quichyguinnkhen dans différents romans comme La Mort nomade

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Musique

Les Mongols ont une longue et riche tradition musicale et toutes les occasions sont bonnes pour donner de la voix. En dehors des salles de spectacle, les instruments traditionnels sont omniprésents dans les foyers. En revanche, il y a toujours quelqu’un pour pousser la chansonnette.

Le khoomi

Le khoomi est le plus célèbre des chants mongols et probablement le plus caractéristique du pays. Le terme  » khoomi  » signifie littéralement  » chant de gorge « . Cette technique de chant guttural permet aux chanteurs de produire deux sons en même temps, l’un grave et profond, l’autre aigu, voire un peu nasillard. Le chant khoomi est essentiellement pratiqué par les hommes, et semble être originaire de l’ouest du pays. Il est également pratiqué par les Tuva, peuple russe du sud de la Sibérie. Le khoomi est mentionné dans L’Histoire secrète des Mongols, ce qui prouve son existence dès le XIIIe siècle, voire avant.

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Les chants longs

Les chants longs (urtyn duu) sont l’une des formes les plus anciennes de chant. Essentiellement vocaux, bien qu’ils puissent parfois être accompagnés d’instruments, ce sont des chants pentatoniques, sans rythme bien défini ni paroles précises. Le chanteur s’exprime par des modulations vocales de voyelles, qu’il doit tenir le plus longtemps possible (d’où le nom, qui n’a en fait rien à voir avec la longueur du chant). La tradition veut que cette forme de chant soit particulièrement affectionnée par les cavaliers, qui se tiennent ainsi compagnie durant leurs longues chevauchées solitaires.

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Les chants courts

Les chants courts (bogino duu) ont en revanche un rythme plutôt enlevé. Ils sont la plupart du temps accompagnés d’instruments et évoquent des thèmes bien précis : l’amour, le pays natal, un bon cheval…

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Les chants épiques

Les chants épiques (tuul) appartiennent à une très longue tradition chantée mongole. Réservés aux hommes, contrairement aux chants courts ou longs, ils sont écrits en vers et se chantent au son du moriin khuur. On peut distinguer deux catégories de chants épiques. Il existe les domog qui sont inspirés de légendes ou de récits historiques, et les magtaal qui chantent le plus souvent l’éloge de la nature.

Les instruments de musique

Les instruments de musique traditionnels mongols sont également nombreux.

Le plus étonnant et le plus connu demeure le moriin khuur, la vièle à tête de cheval. Les deux cordes et l’archet sont en crin de cheval, la caisse de résonance est fermée par une peau de jeune chameau, de chèvre ou de mouton. Les historiens racontent que, sous domination mandchoue, les occupants demandaient aux luthiers de remplacer la tête du cheval par celle d’un dragon…

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Tout aussi ancienne est la guimbarde, qui est un instrument traditionnellement attribué aux chamans.

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La panoplie des instruments à cordes verticaux comprend le kutchir, une vièle à quatre cordes, et le shanz, une sorte de luth à trois cordes.
Les instruments mongols comptent également deux sortes de cithares : l’une dont on frappe les cordes à la manière d’un xylophone, le yootchin ; l’autre dont les cordes sont pincées, le yatga. Il existe enfin un instrument à vent, semblable à une flûte de bambou, que les Mongols appellent le limbe. La plupart de ces instruments sont regroupés dans un orchestre national de musique traditionnelle, qui se produit régulièrement à Oulan-Bator, et interprète des morceaux de musique classique occidentale aussi bien que des airs traditionnels mongols.

La musique moderne

La musique moderne dispose à Oulan-Bator d’une scène très active. L’influence occidentale est très évidente dans les jeunes groupes locaux, qui ont opté pour la musique pop ou pour le rock, voire le rap, mais conservent néanmoins souvent des tonalités traditionnelles, dans les mélodies et surtout les voix. Cette musique est en pleine expansion dans le pays et commence à intéresser des producteurs asiatiques.

En 2002, le premier festival de rock d’Oulan-Bator ne mettait en scène que trois groupes. Deux ans plus tard, 20 groupes se partageaient l’estrade, et les oreilles de plus de 10 000 spectateurs ! Aujourd’hui, cette rencontre musicale s’est pérennisée. Nommé Playtime Rock festival, elle se déroule sur deux jours, en principe début juillet.

Le pays compte actuellement une centaine de groupes pop. Très peu ont cependant eu l’occasion de s’exporter, et restent limités à une audience locale, à l’exception notable de l’ensemble pop Lumino qui se vend bien en Chine. De même, le groupe Hurd, qui compose des morceaux de heavy metal accompagnés de paroles proches de la tradition mongole (famille, pays…), a déjà traduit plusieurs de ses chansons en anglais, en espérant toucher ainsi un public plus large.

Quelques musiciens actuels :

Jantsannorov ( Нацагийн Жанцанноров) est un compositeur de musique traditionnelle. Il est considéré comme l’un des meilleurs compositeurs du moment.

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Norovbanzad est une chanteuse traditionnelle extrêmement appréciée par les Mongols. Elle est décédée en 2002, mais ses morceaux ont toujours autant de succès.

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Samandyn Javhlan est un chanteur pop-folk qui est une vraie star nationale. Révélé au début des années 2000, c’est un des rares artistes à faire l’unanimité toutes générations confondues en Mongolie actuellement. Ses tubes passent en boucle partout.

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Ariunaa, âgée d’une quarantaine d’années, a su séduire la jeunesse avec quelques titres pop et des clips-vidéos où chorégraphies et vêtements traditionnels sont à l’honneur.

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Peinture et arts graphiques

Les peintures les plus anciennes du territoire mongol se trouvent dans les grottes de Khoit Tsenkher, dans l’aïmag (ou province) de Hovd. Il s’agit de peintures rupestres, dans des tons ocre, datant de l’âge de pierre. Un style plus affirmé se précise à l’âge du bronze, avec des peintures aux couleurs plus vives, toujours dépourvues de perspective et figurant des scènes de la vie quotidienne nomade.

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A cet art primitif a succédé un art religieux bouddhique. Les peintures de ce genre sont réalisées sur des supports de cuir, soie, coton ou lin, des matériaux faciles à plier et à transporter. Les couleurs sont fabriquées à partir de pigments minéraux, et ont (comme au Tibet) une forte valeur symbolique. Ainsi, le bleu représente la fidélité et l’éternité ; le jaune, la richesse, l’amour et la spiritualité ; le rouge, la joie ; et le blanc, la sainteté et la pureté. La technique de l’appliqué ne se développera que plus tardivement, dans les monastères, pour des peintures d’un format plus grand qui n’avaient plus besoin d’être transportées. De très beaux exemple de travaux issus de cette technique, peuvent être aperçus au monastère Erdene Zuu à Kharkhorin.

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La peinture religieuse est restée la forme artistique dominante jusqu’au début du XXe siècle. L’influence soviétique a alors dirigé les artistes mongols vers le réalisme socialiste. Ce tournant a notamment été marqué par le peintre Sharav (Балдугийн ‘Марзан’ Шарав) , un ancien moine qui a pour la première fois illustré des thèmes sociaux, mais en utilisant toujours des techniques de peinture traditionnelles. Son oeuvre la plus célèbre, Une journée en Mongolie, est conservée au musée des Beaux-Arts d’Oulan-Bator.

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Les années 1960 et 1970 voient un retour aux techniques traditionnelles de l’appliqué, qui apportent une bouffée d’oxygène dans une production de peintures à l’huile exclusivement consacrées à la gloire des réalisations socialistes. C’est également au cours de ces décennies que les artistes mongols commencent à regarder vers l’Occident et à s’initier à l’art abstrait. Mais les premières oeuvres abstraites seront interdites par les Soviétiques. Leurs auteurs seront sanctionnés.

Depuis les années 1990, avec la fin de l’ère soviétique, l’art contemporain a bénéficié d’un nouvel élan, avec un développement plus important de l’art abstrait et du street art qu’on peut facilement observer dans les rues d’Oulan-Bator.

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Les artistes actuels s’intéressent surtout à la problématique de la préservation des traditions nomades face à l’urbanisation galopante de ces dernières années. Certains d’entre eux introduisent ainsi l’art contemporain dans les steppes mongoles, en réalisant des performances artistiques dans des ovoo ou dans des yourtes comme l’ont fait en 2012 des artistes du collectif Blue Sand.

L’art contemporain en Mongolie

Sculpture

A l’âge de bronze, aux environs de 1000 avant J.-C., apparaissent les pierres de rennes, à la confluence de la peinture et de la sculpture. C’est en tout cas cette époque que la plupart des archéologues ont choisi pour les dater. Réalisées sur des tablettes de granit gris ou de marbre, elles mesurent entre 2 et 5 mètres de hauteur et semblent être liées aux pratiques chamanistes. Les peintures sont en général divisées en trois parties. Le tiers supérieur représente la lune et le soleil, figurant ainsi le Grand Ciel. Le milieu de la pierre est occupé par les rennes, dont la tradition rapporte qu’ils transportent l’esprit du mort vers sa nouvelle demeure. Enfin, le tiers inférieur est celui du monde souterrain, figuré par des arcs, des flèches ou des épées. Généralement rassemblées par groupes d’au moins cinq stèles, les pierres de rennes servaient à marquer l’emplacement des tombeaux de rois ou de guerriers. On en dénombre environ 500 en Mongolie, mais on peut également en trouver ailleurs en Asie centrale. Jusqu’à présent, les archéologues en ont découvert un peu plus de 600 à travers le monde, et souhaiteraient encore mieux comprendre le sens profond de ces pierres.

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Une variante, plus proche cette fois de la sculpture que de la peinture : les pierres hommes (khunni chukuu). Visiblement d’origine turque (on en trouve également dans toute l’Asie centrale), ces statues plates représentent un homme tenant un bol à la hauteur de la poitrine, parfois armé d’une épée. En général orientées vers l’est, elles semblent liées à des pratiques funéraires, sans que l’on sache encore précisément quelles étaient leur valeur symbolique.

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L’importance du bouddhisme. Il faut attendre des siècles et l’apparition du bouddhisme en Mongolie pour voir à nouveau apparaître des sculptures d’exception. Ce domaine de l’art mongol a été tout particulièrement marqué par Zanabazar (1635-1723), le premier Bouddha vivant de Mongolie. Formé à Lhassa, il en a rapporté toutes les techniques de l’art tibétain, qu’il a enrichi des spécificités de la culture mongole. Une école d’art à son nom a ainsi été créée, dont la particularité est la très forte humanisation de ses représentations des divinités, et notamment des déesses. Ces dernières sont dotées de formes très féminines et d’expressions de douceur presque maternelle, qui n’existaient pas dans les représentations tibétaines.

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