RELIGIONS en MONGOLIE

ParJacques BONNAUD

RELIGIONS en MONGOLIE

L’histoire religieuse de la Mongolie est riche car les mongols ont su intégrer les nouvelles croyances tout en conservant les traditions les plus anciennes.
Aujourd’hui le bouddhisme est certes la religion principale de la Mongolie, mais il est teinté par des pratiques chamanistes toujours très vivantes. Pour les Mongols, il n’y a pas d’antagonisme à fréquenter les temples bouddhistes et à visiter leur chamane attitré. Ce mélange de pratique donne un résultat très coloré, définitivement unique, et une très grande spiritualité et de très nombreuses superstitions.

A. Le Chamanisme :

Le Chamanisme trouve ses origines dans les temps préhistoriques et a probablement évolué à partir de tradition formées sur le culte de la nature. Il continue à être pratiqué parmi quelques groupes ethniques mongols – Darkhad, Buryat Khotgoid, Uriankhai et Tsaatanes.
Le Chamane est celui qui représente un clan ou une tribu dans la communication avec les esprits des ancêtres et de la nature. Typiquement, le chamane est celui qui sait communiquer avec   » l’autre monde « . Pour se faire, il exécute une danse rythmique accompagnée des battements du tambour et, parfois aidé d’alcool ou d’herbe qu’il fume, il entre en transe. C’est en émergeant de cette transe que le chamane communique le message des esprits à la communauté. Le chamane est non seulement une figure religieuse, mais un guérisseur, un protecteur de l’art et des coutumes du clan. Il est l’intermédiaire avec l’univers symbolique.
La sélection du Chamane n’est pas faite pas un choix individuel ou collectif, mais par un procédé connu sous le nom de « la touche de l’esprit » – et qui est interprété comme étant l’indication provenant d’un ancien chamane. Le candidat se révèle en entrant en transe. Cet état est généralement accompagné de maladie qui peut durer de quelques jours à plusieurs années, et qui peut seulement être expliqué par un autre chamane. Si un individu qui a souffert de la maladie des chamanes ou a connu la « touche de l’esprit » ne devient pas chamane, il est coutume de croire que cette personne va mourir.

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Les Ovoos :
L’ovoo est un monument traditionnel associé à l’origine au culte des Montagnes et du ciel. Il prend le plus souvent la forme d’un tas de pierres, et se trouve typiquement au sommet des collines et des montagnes, ou de tout autre endroit sur élevé. Dans les régions où l’on trouve peu de pierres, l’Ovoo peut être construit à partir de sable, de terre ou encore de branches d’arbres.
Bien que de nombreux ovoos soient simplement édifiés comme des bornes au col des montagnes, la plupart sont considérés comme étant des monuments sacrés. Un Mongol ne doit jamais passer devant un ovoo sacré sans s’arrêter. Il doit descendre de son cheval, faire une offrande à l’Ovoo (Soit placer de l’argent sur l’ovoo, soit l’asperger de Vodka ou de produits laitiers, soit couper quelques crins de la queue de son cheval et les attacher à l’ovoo). Il doit également y ajouter une pierre.
L’ovoo joue un rôle important dans les cérémonies du sacrifice. Généralement le culte de l’Ovoo se déroule à la fin de l’été. Au moment de la vénération, trois branches sont placées sur l’ovoo et des drapeaux, confectionnés à base de tissus ou de papiers et recouverts de textes religieux, sont noués à celles-ci. Sur ou à proximité de l’ovoo, les fidèles brûlent de la genièvre en guise d’encens sur une rangée de 3 pierres menant à chacun des quatre côtés de l’édifice. A proximité ou sur le sommet de l’ovoo, on allume un feu, et les fidèles font alors leurs offrandes de viande, produits laitiers, vodka ou airag. Ensuite un chamane exécutera une danse ou des lamas feront une lecture, les fidèles s’asseyant au nord-ouest de l’ovoo (de nos jours, l’implication croissante des moines dans la bénédiction des ovoos a fait fortement diminué la participation des chamanes dans ce rituel). Une fois la cérémonie terminée, les fidèles se partagerons la viande restante ainsi que les produits laitiers, laissant sa part à l’ovoo

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Le Fétichisme :

Le fétichisme se caractérise par la croyance que les objets possèdent des pouvoirs magiques ou sont habités par des esprits, l’apparence extérieure et les caractéristiques internes et fondamentales de n’importe quel objet étant inévitablement liés. Ainsi la couleur, l’odeur, la texture, ou le son d’objets ou d’animaux expriment des caractéristiques importantes. La couleur blanche par exemple est associée avec la pureté et cette propriété est attribuée à tous les objets de cette couleur.
De la même manière, les arbres, montagnes, animaux avec une forme particulière sont considérés comme étant sacrés, leur forme étant supposé exprimer des caractéristiques internes spéciales (ou magiques). L’adoration d’arbres, animaux ou formations géologiques insolites persiste encore aujourd’hui. De même la symbolique liée à la forme et de couleur continue à être respectée par les Mongols traditionnels.

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L’Animisme :
L’animisme est la conviction que toute chose possède un esprit particulier. Les Mongols aujourd’hui encore adorent les esprits du ciel, des montagnes, de l’eau et du sol, leur faisant des offrandes de produits laitiers, de vodka, de petits gâteaux, ou encore de thé, dans l’espoir que l’esprit de la montagne leur viendra en aide.
La principale cérémonie du sacrifice portait sur l’Ovoo, véritable objet de culte pour les Mongols, alors que les rituels de sacrifice plus routiniers du lait ou de l’airag sont fait avec le tsatsal, une cuillère en bois utilisée pour les offrandes et avec laquelle les Mongols jettent aux esprits de la nature la meilleure partie de leur lait frais. Ces deux traditions sont toujours suivies de nos jours : beaucoup de Mongols continuent à croire en l’existence d’esprits de la nature, et plus particulièrement en l’esprit de la montagne.

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Le Tengri : Le Grand Ciel,  » Tengri « , est l’esprit le plus vénéré de la tradition animiste mongole. Il est aussi garant du pouvoir et de sa légitimité. Chinggis Khaan était ainsi parfois surnommé  » fils du ciel « . Selon la représentation chamaniste du monde, il existe 99 cieux, dont 55 occidentaux, et 44 orientaux, que seuls les chamans peuvent explorer au cours de leurs transes. Le Grand Ciel est aujourd’hui encore au coeur de nombreuses pratiques quotidiennes des Mongols. Ainsi tout banquet sera inauguré par l’aspersion d’alcool vers le ciel et la Terre. De même, à l’aube du premier jour de Tsaagan Sar, le nouvel an mongol, les familles lancent des jets de lait vers le ciel, afin que Tengri leur accorde une année heureuse et prospère.

Mongolie, Province de Arkhangai, campement nomade, femme nomade faisant une offrande aux esrpits du Ciel, Tengri // Mongolia, Arkhangai province, nomad woman making an offering to Tengri, the spirit of the sky

Les Montagnes sacrées :
La tradition de vénérer les montagnes provient des temps préhistoriques. Les montagnes les plus sacrées (par ex., Otgon Tengel, Altan Ovoo) sont adorées régulièrement par des cérémonies nationales. Les montagnes de seconde importance sont quant à elle objet de culte pour les populations locales. Les personnes visitant une montagne sacrée feront des offrandes et feront probablement un souhait à l’esprit de la Montagne. Il est considéré inopportun de monter sur une montagne sacrée sans avoir un but précis et important. Les femmes ne sont pas autorisées à en faire l’ascension, mais peuvent faire preuve de respect au montagnes sacrées en en faisant le tour.
Les Mongols donnent traditionnellement des noms honorifiques aux Montagnes sacrées, tel que « khairkhan », « khaan », ou « Bogd ». Ainsi, on peut trouver à proximité d’Ulaanbaatar une Montagne appelée Songino Khairkhan, ou encore la Montagne de Batkhaan ou de Shiliin Bogd. Le nom de Khairkhan provient du nom d’un esprit vivant sous la terre et qui était vénéré dans les temps anciens. Le mot « Khan » a la même origine que le mot « khaan » signifiant Roi, et signifiant à l’origine l’homme le plus riche ou le plus puissant d’un groupe. « Bogd » vient du mot Bouddha, et se réfère à une réincarnation d’un Bouddha. Dans le cas d’une montagne, on l’interprète comme un lieu aussi unique et grande que l’est un Bouddha.
Normalement, les montagnes nommées « khairkhan » sont pourvues de sommets escarpés et pointus recouverts de neige et de glace, et de pentes rocailleuses. Les montagnes nommées Khaan › ou « khan » ont des sommets longs et continus recouverts part la végétation. Le nom « Bogd » est donné aux Montagnes les plus révérées et sacrées, principalement localisées dans la steppe et le Gobi. La Montagne de Bodg Khan, située au sud d’Ulaanbaatar, n’a pas les sommets escarpés et rocheux caractéristiques de la plupart de montagnes de «khairkhan», mais ils sont si majestueux qu’elle est la seule montagne de Mongolie à porter les trois noms de honorifiques, « Khan Bogd Khairkhan ».

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le Totémisme :

Il se caractérise par la croyance en la connexion entre l’origine d’un groupe et un totem défini, le plus souvent un animal. Le loup et le cerf sont les totems les plus familiers.

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B. Le Bouddhisme en Mongolie :

Les premiers temples bouddhistes en Mongolie ont été construits durant la période des Huns, qui débuta lors du 3ème siècle avant J.C. De l’an 330 à l’an 550 après J.C., dans la période de Mongol-Nirun, le Bouddhisme était devenu la religion officielle de l’état, et plus de dix rois se virent donner des titres bouddhistes honoraires. Pourtant le Bouddhisme n’était pas pratiquer par les gens du peuple, qui continuaient à suivre les pratiques ancestrales chamanistes.

Le bouddhisme redevint la religion de l’état Mongol pour la seconde fois pendant la période de l’Empire Yuan, quand Kubilai Khaan a fait de Lama Pagva le maître spirituel de la Nation. Après l’effondrement de l’Empire Yuan, cependant, le chamanisme redevient la religion la plus populaire.

Au 16e siècle, le Bouddhisme redevînt la religion d’état de la Mongolie pour la troisième fois. En 1587, Altan Khaan fût le premier à donner le titre de Dalai Lama, signifiant «océan de sagesse», à Sodnomjamts, le leader de la « secte jaune » du bouddhisme tibétain.

Pourtant le bouddhisme ne fût réellement pratiqué par les gens du peuple qu’à partir du 19ème siècle. Le sommet du développement du Bouddhisme en Mongolie fut atteint à la fin du 19ème siècle – début du 20ème. Avec le support des Manchus plus de 700 monastères ont été construits à travers le pays, accueillant plus de 30,000 lamas.

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Les Manchus avaient comme politique d’encourager la diffusion du bouddhisme en Mongolie en partie dans le but d’anéantir la culture locale, et en partie comme un moyen de minimiser l’opposition politique potentielle à leur régime, en s’assurant qu’une grande proportion de la population mâle ait été engagée dans les monastères.

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Au début du 20ème siècle, on dénombrait 115,000 lamas en Mongolie, correspondant à 20% de la population totale et à plus d’un tiers de la population mâle du pays. Les jeunes garçons étaient typiquement inscrits dans les monastères dès l’âge de cinq ou six ans, où ils étaient élevés sous le tutorat de vieux lamas.

Baroun Kuche monastery Hurjit Region Mongolia Nouveau Temple de Shankin Barun Kuree, (sum de Qudjurt dans l'aymag de Ovorqangay, Mongolie). Un vieux lama est un sage. Un moine âgé a figure de sage dans la société et il est très respecté. Tant de connaissances spirituelles, tant de savoir accumulé durant sa vie font de lui un être exceptionnel qui est proche de la pureté et de la vérité absolue. Autrefois, au décés de l'un d'entre eux, on découpait sa calotte crânienne qu'on associait à une autre d'un de ses confrères décédés, ou bien à celle d'une jeune fille vierge morte prématurément, pour en faire un petit tambour-sablier à boules fouettantes, le damaru, en usage dans les monastères. R87/200 L920730d / P0007423

En 1911, la Mongolie est devenue un état religieux indépendant avec le 8ème Bogd Khan comme dirigeant. A la suite de la révolution populaire de 1921, le Bouddhisme commença toutefois à décliner, et dans les années 1930 et 1940, presque la totalité des monastères mongols fûrent détruits par le gouvernement dans un effort pour abolir la religion de l’état.

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La forme du bouddhisme pratiquée en Mongolie a extrêmement été influencée par les pratiques rituelles et mystiques du Tantrisme, reflétées surtout dans la croyance dans le pouvoir surnaturel des mots sacrés. Cette croyance prend la forme de livres ou drapeaux imprimés et de mantras récités. Dans « la secte jaune » du bouddhisme, le livre est l’objet le plus sacré. Il est la source de sagesse aidant l’Homme à échapper à sa souffrance. En cas de maladie ou de malheur, ainsi qu’aux périodes indiquées par les tables astrologiques, les Mongols considèrent opportun de lire ou de faire lire par des lamas des livres en particulers. Typiquement, ce n’est pas le livre entier qui est lu mais le dharani, des séries de textes et de syllabes magiques qui renferment l’essence du livre en question. Chaque famille considére qu’il est de très bonne augure d’être en possession d’un sutra religieux, qui est plié dans un tissu et gardé précieusement dans l’arrière de la yourte. Seul un Lama est autorisé à toucher ce sutra. Ainsi il n’est jamais lu comme tel, mais conservé en symbole de son contenu, lequel est considéré comme ayant de l’influence en fonction qu’il soit lu ou pas.

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Les Mongols croient également que placer un drapeau de prière (khiimoriin dartsag) sur un poteau à l’arrière de leur yourte leur apportera soutien dans leur vie quotidienne. Les mots inscrits sur leur drapeau sont supposés être « activés » par le souffle continu du vent. De la même manière les prières peuvent être activées en portant un livre à sa tête, ou en tournant la roue d’un moulin à prière, un appareil cylindrique contenant des centaines de prières.

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Le Tsam : Les cérémonies tsam, dont l’âge d’or se situe en Mongolie au XVIIIe siècle, refont leur apparition après des décennies d’interdiction sous l’occupation soviétique. Importées du Tibet, elles se sont teintées en Mongolie de références au chamanisme local, qui influencent à la fois leur chorégraphie et les personnages mis en scène. Au XVIIIe siècle, il existait presque autant de danses tsam que de monastères, soit près de 500 variantes de cette cérémonie bouddhiste destinée à exorciser les mauvais esprits. Deux formes de cette danse des masques très ritualisée se sont néanmoins imposées dans le pays : le Jahar Tsam et le Khuree Tsam. Ce dernier, célébré tous les ans le neuvième jour du dernier mois d’été, mettait en scène 108 personnages aux costumes les plus variés. Le personnage le plus connu de ces cérémonies tsam mongoles est probablement le  » Vieil homme blanc « , une figure chamaniste symbolisant la fertilité des Mongols et de leurs troupeaux.

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C. Le Cadre juridique des religions en Mongolie :

Dans ce cadre humain, économique et politique en évolution rapide, le paysage religieux connaît aussi des mutations profondes. La fin de la domination soviétique a apporté avec elle un retour à la liberté religieuse, et la Constitution adoptée le 13 janvier 1992 garantit toutes les libertés fondamentales, y compris la liberté de religion. La Constitution stipule officiellement le principe de séparation entre l’État et les groupes religieux. Cependant, bien que le bouddhisme pratiqué par les Mongols ne détienne en aucun sens le statut de religion officielle, la loi mongole affirme néanmoins que le gouvernement doit respecter le bouddhisme en tant que religion majoritaire de la population – affirmation de respect justifiée par la nécessité de préserver l’unité du pays et de défendre l’histoire et la culture mongoles.

Il semble cependant que, récemment, la grande liberté religieuse, qui allait de pair avec l’ouverture du pays au cours des années 1990,  soit remplacée progressivement par une bureaucratie restrictive et intrusive qui cherche à vérifier l’évolution des diverses communautés religieuses considérées comme « étrangères » à la culture nationale – ce qui est notamment le cas de différentes communautés chrétiennes.

Ce durcissement s’exprime dans une myriade de règlements et de normes administratives auxquelles les diverses organisations religieuses doivent se soumettre, car elles sont traitées de la même manière que les ONG. Par conséquent, les organisations religieuses ne peuvent pas œuvrer à moins qu’elles ne s’enregistrent auprès de l’Autorité générale, un organisme d’État. Par ailleurs, la loi ne précise pas la période de validité des certificats d’enregistrement émis par cet organisme, de sorte que, en réalité, ce sont les administrations locales qui en déterminent la durée.
Dans la pratique, les organisations religieuses se trouvent obligées de renouveler leur certificat d’enregistrement chaque année et, pour ce faire, ils doivent s’adresser à six organismes administratifs différents, au niveau local et national. Ce processus est long, fastidieux et imprévisible, car certaines provinces sont plus réticentes que d’autres à fournir des certificats d’enregistrement.

L’une des conditions les plus restrictives, et qui s’applique à toutes les organisations étrangères présentes en Mongolie, est l’obligation d’inclure un pourcentage minimum d’employés mongols dans leur personnel. Ce pourcentage se situe entre 25 % et 95 %, en fonction du secteur d’activité. Chaque année, une liste est publiée, en précisant le pourcentage requis, et les organisations qui ne se trouvent pas dans les secteurs spécifiés se retrouvent automatiquement avec le quota maximal de 95 % d’employés locaux. Cette situation touche la plupart des organisations religieuses, notamment les Églises chrétiennes et leurs dirigeants, dont le personnel et le financement continuent d’être en grande partie d’origine étrangère. Ces organismes religieux ont soulevé des objections à ce système. L’Église catholique est une exception, car, contrairement à presque toutes les organisations religieuses qui ont le statut d’ONG et dont le personnel doit être local à 95 %, l’Église catholique a réussi à obtenir un quota de seulement 75 %.

D. Problèmes de liberté religieuse :

Cela dit, ce système de quotas pose un problème réel pour l’Église catholique. En 2014, Mgr Wenceslas Padilla, préfet apostolique d’Oulan-Bator et missionnaire philippin de la Congrégation du Cœur Immaculé de Marie (CICM), tout en exprimant sa satisfaction pour la liberté religieuse garantie par le gouvernement, a déploré en même temps les fardeaux imposés par ce type de réglementation. « Selon ces quotas, l’Église catholique devrait, en théorie, employer 60 autres personnes, mais nous ne disposons pas d’argent pour payer leurs salaires », a-t-il observé, ajoutant que si la loi devait être appliquée stricto sensu, « 13 missionnaires (sur un ensemble d’à peine plus de 80) seraient obligés de partir ».
Un homme d’affaires occidental établi à Oulan-Bator depuis quelques années a confirmé cette situation sous anonymat: « Environ 18 temples protestants ont été officiellement fermés dans la seule province de Darkhan-Uul » pour diverses infractions à cette norme. Il ajoute que tout le pays est largement ouvert à l’investissement étranger, lorsqu’il s’agit du personnel, tandis que cette restriction est un lourd fardeau pour les organisations chrétiennes. « Dans le cas d’un pasteur étranger, il doit employer 19 Mongols, ce qui dépasse la capacité de la plupart des communautés chrétiennes … Un nombre considérable de pasteurs [sud] coréens ont obtenu un visa d’affaires, même si en réalité ils viennent pour évangéliser – ce qui est de moins en moins toléré par les autorités », conclut-il.
L’une des premières communautés ciblées par cette loi, qui est toujours appliquée inégalement, est l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours qui dit avoir 10 000 adeptes dans le pays. Plusieurs de ses missionnaires américains ont été contraints de quitter le pays en raison de cette loi
Hormis la question des quotas pour les employés locaux, les organisations religieuses, en particulier celles qui sont chrétiennes, rencontrent des difficultés récurrentes dans l’obtention des autorisations nécessaires à la construction et à la gestion de lieux de culte. Selon le registre de l’Autorité générale, en 2014, le pays avait un total de 656 lieux de culte, dont 289 bouddhistes, 266 chrétiens (toutes confessions confondues), 28 musulmans, 21 chamaniques et 52 appartenant à d’autres groupes religieux. Dans un pays où les chrétiens ne représentent que 2 % de la population, certains fonctionnaires de l’État ont fait savoir aux dirigeants des communautés chrétiennes que, à leur avis, il y avait déjà « trop » d’églises dans le pays et que, par conséquent, ils n’accorderaient plus de permis pour de nouveaux lieux de culte chrétiens.
Pour l’Église catholique, qui a célébré le 20e anniversaire de sa présence dans le pays en 2012 et qui a vu ses fidèles passer de zéro en 1992 à un millier aujourd’hui, ces obstacles bureaucratiques représentent de réelles difficultés. En Mongolie, l’Église catholique gère plusieurs centres pour les enfants de la rue, les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées ainsi que des cliniques et des centres médicaux dans un pays où l’infrastructure sociale et les soins de santé font défaut. Néanmoins, elle n’a qu’une dizaine de lieux de culte et procède avec prudence dans ses démarches auprès de l’administration. Sur les 21 provinces de la Mongolie, 17 n’ont aucun lieu de culte catholique. C’est le cas, par exemple, de la province centrale, où les Sœurs de Saint Paul de Chartres gèrent une école depuis 15 ans, mais elles n’ont pas encore obtenu un permis pour construire un lieu de culte, en dépit de nombreuses demandes par les chrétiens de la région.
Le 18 janvier 2016, Enkh (« paix » en mongol) Baatar, âgé de 29 ans, est retourné en Mongolie après plusieurs années de séminaire en Corée du Sud. Il a été ordonné prêtre le 28 août 2016, devenant ainsi le premier prêtre catholique mongol. Outre l’importance ecclésiastique et apostolique de son ordination pour l’Église catholique, cet événement aura aussi des conséquences pratiques immédiates, puisque, pour la première fois, le vicariat apostolique de Oulan-Bator aura le droit de posséder des biens et pourra être son propre représentant juridique. En effet, en vertu de la législation en vigueur, seul un citoyen mongol peut posséder des terrains ou diriger une organisation religieuse. Voici pourquoi le fonctionnaire principal de l’Église catholique en Mongolie est la secrétaire du préfet apostolique : elle possède officiellement la plupart des terrains de la préfecture apostolique à Oulan-Bator.

E. Islam :

Seconde religion du pays, l’islam est propre à la minorité kazakh et se trouve concentré dans certaines provinces de l’Ouest de la Mongolie, dans la chaine de l’Altai. Il regrouperait 8 à 9% de la population. Les musulmans disposeraient aujourd’hui de 34 mosquées et d’une madrassa

F. Le Christianisme :

a. Il y aurait un noyau familial du Chemin du Néocatéchuménat à Oulan Bator

b. Guillaume de Rubrouck : Moine franciscain qui fut envoyé au XIII ièm siècle par Saint Louis auprès du Grand Khaan, Möngke, pour qu’il vienne en aide aux chrétiens contre les Musulmans et pour convertir la Mongolie. Il demeura quelques mois sans succès mais il rapporta un témoignage très riche sur les rites et coutumes mongols.

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c. Généralités :
Le christianisme en Mongolie et particulièrement le nestorianisme ( Doctrine qui affirme que deux personnes, l’une divine, l’autre humaine coexistent dans le Christ),, a été la religion dans laquelle ont été élevés plusieurs Khagans, à la suite du mariage de Tuluy fils de Gengis Khan à une nestorienne.

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Le recensement de 2010 dénombre 2,1 % de chrétiens parmi les 2 754 685 habitants du pays

Des franciscains ont voyagé dans l’Empire mongol, avant et pendant la dynastie Yuan, Jean de Plan Carpin (1245 — 1247), Guillaume de Rubrouck (1253 — 1254), Jean de Montecorvino (1294 — 1328)

Le Royaume d’Arménie, chrétien, et les communautés chrétiennes d’Asie, comme celles des nestoriens s’appuient sur les Mongols (Tartares). Louis IX (dit Saint Louis) s’allie à eux contre les sarrasins. Ces échanges apportent une influence hindouiste, bouddhique et plus généralement orientale aux représentations dans l’art chrétien

En 1874, le Diocèse catholique roman de Xiwanzi (en) (à Xiwangzi 西弯子 / 西彎子, xīwānzǐ), Suiyuan, actuelle ville de Hohhot, Mongolie-Intérieure, fut le siège du premier vicariat apostolique de Scheut. Il servit alors de refuge aux Lazaristes subissant les persécutions de la moitié du XIXe siècle

d. Le Nestorianisme :
C’est une doctrine christologique affirmant que deux personnes, l’une divine, l’autre humaine, coexistent en Jésus-Christ. Cette thèse a été à l’origine défendue par Nestorius (né vers 381 — mort en 451), patriarche de Constantinople (428-431). Son enseignement, reconnu hérétique, est condamné. Les Nestoriens rejettent les formulations dogmatiques issues du concile d’Éphèse et des conciles suivants. Le nestorianisme est une des formes historiquement les plus influentes du christianisme dans le monde durant toute la fin de l’Antiquité et du Moyen Âge à partir de l’Église d’Orient. Des Églises liées à ce courant du christianisme oriental perdurent à l’est de l’Anatolie et au nord de la Mésopotamie (Turquie et Irak).
La doctrine christologique de l’Église de l’Orient a été formulée définitivement par le moine et théologien Babaï le Grand (v. 550-628), en des termes, d’ailleurs, qui s’écartent singulièrement de ce qu’on avait coutume de dénoncer comme l’« hérésie nestorienne » dans l’Église romano-byzantine (l’existence de deux « personnes » distinctes en Jésus-Christ). En fait, le désaccord se concentre sur le refus par les « nestoriens » du principe de la communicatio idiomatum (la possibilité d’attribuer à chaque nature du Christ ce qui relève de l’autre nature) : ainsi, les « nestoriens » refusent qu’on appelle la Vierge Marie Théotokos (Mère de Dieu) parce qu’elle n’est pour eux que la mère de l’homme Jésus, ou qu’on dise que « Dieu a souffert et a été crucifié » parce que seule la nature humaine de Jésus, selon eux, a subi ces épreuves (mais elle les a subies « unie à sa divinité », précise Babaï) ; les « nestoriens » pensent que cette « communication des idiomes » conduit au théopaschisme, qu’ils refusent.
À la suite de la Réforme, des théologiens protestants ont été taxés de nestorianisme parce qu’ils refusaient de parler de Marie comme la Mère de Dieu, lui préférant le titre de Mère de Jésus.
Le dialogue interconfessionnel entre l’Église catholique et l’Église apostolique assyrienne de l’Orient entrepris, depuis les années 1960, a abouti à la signature, le 11 novembre 1994, entre pape Jean-Paul II et le patriarche Mar Dinkha IV, d’une « Déclaration christologique commune » [archive] , qui clôt, pour leurs Églises, les différentes controverses liées à la querelle nestorienne. Sur la question de la qualification de Marie, les deux Églises déclarent : « Mais le même Verbe de Dieu, engendré par le Père avant tous les siècles, sans commencement selon sa divinité, dans les derniers temps est né d’une mère, sans père, selon son humanité. L’humanité à laquelle la bienheureuse Vierge Marie a donné naissance a été depuis toujours celle du Fils de Dieu lui-même. C’est la raison pour laquelle l’Église assyrienne de l’Orient prie la Vierge Marie en tant que « Mère du Christ notre Dieu et Sauveur ». À la lumière de cette même foi, la tradition catholique s’adresse à la Vierge Marie comme « Mère de Dieu » et également comme « Mère du Christ ». Les uns et les autres nous reconnaissons la légitimité et l’exactitude de ces expressions de la même foi et nous respectons la préférence de chaque Église dans sa vie liturgique et sa piété. »

e. L’Eglise catholique :
En 1992, à peine la nouvelle république de Mongolie naissait-elle des cendres de l’ancien Etat communiste qu’elle établissait des relations diplomatiques avec le Saint-Siège et autorisait de nouveau les missionnaires à pénétrer sur son territoire. Trois missionnaires du Cœur Immaculée de Marie (CICM), dont le futur Mgr Wenceslao Padilla, avaient été alors envoyés reconstruire les bases d’une communauté chrétienne sur les lieux où, soixante-dix ans plus tôt, la même congrégation avait créé une mission sui juris, entièrement balayée par l’avènement du communisme

Aujourd’hui, la préfecture apostolique de Mongolie, érigée en 2002, compte quatre paroisses. Trois d’entre elles se trouvent dans la capitale Oulan-Bator : Ste-Marie, St Pierre-St Paul (cathédrale), le Bon Pasteur. La dernière née, Marie-Secours des chrétiens, créée en 2007 se trouve à Darhan, la deuxième ville plus importante de Mongolie. A ces communautés paroissiales, il faut également ajouter un nombre croissant de missions et de chapelles, dont Dair Ekh, Niseh, Shuwuu, Yaarmag, Zuun Mod, Arvaikheer, ou encore Bayan-Khoshuu.

Le 28 août 2015, une première dans l’histoire récente du pays, un prêtre catholique mongol, le P. Enkh Baatar, était ordonné devant une bonne partie des 1 200 catholiques du pays, rassemblés en la cathédrale Saint Pierre-Saint Paul d’Oulan-Bator. Agé de 25 ans, le jeune prêtre catholique est le premier prêtre d’origine mongole à intégrer un presbyterium exclusivement composé de missionnaires étrangers, du moins pour le moment.

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